Le secret de l’or, by Madeleine RAILLON Editions G.P.Paris Bibliothèque Rouge et Or Souveraine Dépôt légal 1961

FICHE TECHNIQUE DU LIVRE

Edition :   ÉDITIONS G.P., 80, RUE SAINT-LAZARE, PARIS

BIBLIOTHEQUE
ROUGE ET OR

est le cent- soixante et unième
DE LA BIBLIOTHÈQUE
ROUGE ET OR

ILLUSTRATIONS DE JACQUES PECNARD
Couleurs pleine page hors-texte nnotées et,
Couleures, noir & blanc in texte.

Il a été imprimé
pour les ÉDITIONS G. P. A PARIS

Photogravure S. T. O.

    Dépôt légal n° 796   1er trimestre 1961

© 1960 – Éditions G. P. Paris

PRINTED IN FRANCE

Reliure :   Pelline ivoire, dos orné, plat décoré au balancier.
Jaquette à double volets avec texte.

Livre épuisé chez l’ Editeur

EXTRAIT   Le secret de l’or , by Madeleine RAILLON page 51

  Un jeudi de novembre, alors que Fred partait à la sauvette en essayant de le fuir, Maya s’écria en le voyant :
  – Comment n’y avais-je pas pensé? Fred, tu caches mal ton jeu! J’ai tout deviné!
  – Allons, je suis pressé et ne comprends pas de quoi vous voulez parler. Laissez-moi passer, je vous prie!
  – Tu as trouvé le secret de l’or! Tu as trouvé et tu ne veux pas me le dire, enfant dénaturé. Est-ce une chose à faire au vieux père Maya? C’est lui qui t’a permis d’être un savant. Sans lui, Lascaris ne serait jamais venu te chercher dans une mansarde! Ils t’ont défendu de parler, n’est-ce pas, ceux du palais? Comme d’habitude, le roi veut garder tout. Ça ne se passera pas comme ça. Tu vas voir si le père Maya va le garder, lui, le secret de l’or! Le monde entier va le savoir.
  – Vous n’y pensez pas sérieusement? Je vous jure que c’est faux. Je n’ai rien trouvé. Je vous en supplie, reprenez vos esprits!
  Déjà il lui avait échappé et se précipitait dans la rue. C’était la catastrophe. Que l’on pût imaginer sa découverte réalisée, alors que lui-même ignorait toujours le secret, c’était un comble. Ce jeudi-là, Fred n’osa pas rentrer à la maison et passa la journée dans le laboratoire du château. Le vendredi, quand il crut Maya un peu calmé, il se glissa hors du palais à la tombée de la nuit et essaya d’atteindre furtivement son logis.
  A l’entrée de la rue, une rumeur l’avertit de fuir. Trop tard! Une ombre jaillit de dessous l’auvent. A sa grande surprise, M. Zorn, son ancien maître, le saisit amicalement par le bras et l’entraîna vers la maison.
  – Je sais tout! dit-il, très excité. Ah! Fred, comme je suis fier d’être à l’origine de ta découverte! Te voilà riche à présent, tu es l’homme le plus puissant du monde, le garçon qui, le premier, a fabriqué l’or! J’espère que tu te souviendras de ton ancien maître et de tout ce qu’il a fait pour toi!
  – Je vous en prie, balbutia Fred en bégayant. Je n’ai rien découvert. Ce que dit Maya est faux. Moi seul dis la vérité, je vous le jure!
  – Ne fais pas de manières, Fred. Les grands savants ont toujours, au début, nié leurs découvertes. Ils aiment se faire prier. Tu as déjà leur coquetterie? Non, Fred. Viens avec moi. Tous tes amis sont là pour te fêter. Je suis venu me joindre à eux. Songe qu’ils t’attendent depuis l’aube et il est dix-sept heures, exactement!
  – Mes amis, quels amis?
  Une foule de visages inconnus l’acclamait devant sa porte.
  – Vive Jean-Frédéric Bottger. Vive le faiseur d’or!
  « Ses amis »? Pas une de ces physionomies ne lui était familière. Où était Wilfrief? Une ronde de petites mains tournait autour de lui, l’infernale ronde des trois Jacot. Et leur mère ne grondait plus. Elle accourait pour féliciter Fred :
  – Je l’avais toujours dit, clamait-elle. L’or! Il a trouvé le secret de l’or. Vous n’oublierez pas mes enfants, monsieur Fred, vous savez combien ils vous aiment!
  La voix de l’aveugle lui parvint :
  – Ayez pitié de moi, monsieur Bottger. Vive Fred, notre bienfaiteur!
  – Vive Fred! Hourra! reprenait la foule.
  – Ah! monsieur, béni soit le jour où vous êtes entré dans notre maison!
  C’était le perruquier qui l’embrassait comme il avait vu faire les gens de cour.
  – Vive Fred! Vive Fred!
  Maya, qui pérorait, se retourna alors vivement.
  Il était si occupé jusque-là par sa harangue qu’il ne l’avait même pas vu venir. Fred eut la surprise d’apprendre qu’il lui avait servi de père, l’avait instruit et que c’était chez lui, dans un de ses livres, qu’il avait trouvé le fameux secret. Ainsi fait-on l’Histoire.
  Jean-Baptiste Jacot le tira par la manche.
  – Maya, voici Fred!
  – Ah! fit alors Maya. Toi enfin!
  Et, dans un geste de dément, il le présenta à la foule :
  – Jean-Frédéric Bottger, le faiseur d’or!
  – Ne l’écoutez pas, ce n’est pas vrai. Il a perdu la raison.
  Mais la foule désirait trop y croire pour que Fred pût s’en tirer par quelques dénégations. Les mains se tendirent vers lui et, pour la première fois, monta vers lui le cri affreux :
  – De l’or! De l’or!
  Alors ils commencèrent à se pendre à ses basques, à essayer de fouiller ses poches, à déchirer son habit. Il se démenait comme un diable. M. Zorn était à ses côtés. Il considérait Fred comme un personnage trop précieux pour le laisser écarteler.
  – Tracez-moi un chemin! lui dit l’ancien apprenti.
  Il n’avait pas l’air commode et jouait des pieds et des poings, lui aussi. La canne de M. Zorn leur fut d’un grand secours, car ses moulinets n’avaient rien d’engageant.
  – Laissez passer! cria-t-il. Sinon…
  Son air menaçant, sa dignité bourgeoise firent leur petit effet et la foule s’entrouvit. Un vrai miracle!
 

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